TRIBUNE DE LA SEMAINE | AGENCES DE DESIGN : DÉFENDRE LA VALEUR DE NOS IDÉES | Design Fax

Cette semaine, c’est Frédéric Messian, président de Lonsdale, qui s’exprime autour des enjeux des modèles d’agence. Après le passage à vide des années Covid, et un exercice 2022 contrasté, la conjoncture qui s’annonce en ce début d’année risque de ne pas être à  la hauteur de nos espérances : la croissance ralentit, la volatilité du business reste historiquement élevée, la baisse de la rentabilité opérationnelle se confirme, les trésoreries se tendent à nouveau (la course au fameux PO), et l’intensité concurrentielle entre les acteurs du marché ne faiblit pas.

Pourtant, le contexte n’avait jamais été à priori aussi favorable. La marque est devenue un levier de management et un élément structurant de la transformation dans laquelle toutes les entreprises sont engagées. Le design possède cette capacité unique de pouvoir syncrétiser les transformations et de les rendre explicites aux yeux de toutes les parties prenantes (consommateurs, collaborateurs, partenaires,  etc.).

Nos agences accompagnent les entreprises autour de ces enjeux de marque, avec énergie et talent, aux côtés de nombreux acteurs du conseil en organisation, en transformation, en systèmes d’information… qui valorisent leurs prestations infiniment mieux que nous.

Ce n’est pas un hasard. La valeur que nous créons pour les marques, de façon indiscutable, est insuffisamment valorisée. Chaque acteur du marché a sa taille et en fonction de sa situation particulière, tente de se transformer et de trouver des parades, mais aucune réponse collective forte ne se dessine. Nous devons pourtant agir sans délai pour défendre la valeur de nos idées.Nous devons changer radicalement de paradigme. Il s’agit pour nous tous d’une petite révolution culturelle !

Les agences se sont historiquement construites sur un modèle dopé à la croissance. Nos stratégies et nos comportements se sont développés dans ce but ultime. Pour maintenir de la croissance, coûte que coûte, nous nous sommes progressivement laissé enfermer dans trois pièges qui se sont révélés destructeurs de valeur.

Nous avons accepté de nos clients, au fil du temps, des baisses excessives de rémunérations, sous la pression notamment de services achats mal informés de nos spécificités. Cette paupérisation lente et insidieuse a eu notamment pour effet direct de rendre nos entreprises moins attractives auprès des jeunes diplômés qui désertent progressivement nos rangs, préférant ceux de la Finance, du Conseil ou de laTech, ce qui nous fragilise à long terme. Nous nous sommes ensuite laissé emporter de façon inconsidérée dans l’engrenage de compétitions créatives de plus en plus lourdes et quasiment plus jamais rémunérées. Gagner un nouveau client à l’issue d’un épuisant et long processus de compétition devient une gageure. En avons-nous encore les moyens ? Nous savons qu’un client gagné après une compétition créative ne se rentabilise en moyenne qu’au bout de trois ans. Nous savons également que la collaboration avec ce même client ne dure, toujours en moyenne, qu’à peu près deux ans. Cherchez l’erreur ! Une agence comme Lonsdale consacre annuellement environ 20 000 heures aux appels d’offres, c’est-à-dire l’équivalent de 11 personnes à temps plein. Ce n’est pas tenable. Et le tiers de ces appels d’offres n’ont jamais de suite !

Nous avons enfin laissé se développer avec nos clients un système de collaboration à la mission, sans visibilité ni protection. Nous sommes révocables ad nutum, quasiment sans recours. Les agences de publicité sous l’impulsion de l’AACC ont su bien mieux que nous organiser et contractualiser la relation avec leurs clients.

Nous n’avons d’autre choix que de changer radicalement de logique. Une marque forte a besoin pour réussir d’agences de branding et de design fortes, engagées et en bonne santé. Nous devons leur assurer, dans la durée, la meilleure qualité de service.

Je ne crois pas à la théorie des clients « malveillants » par nature. Je pense simplement qu’ils sont eux mêmes soumis à une pression inédite. Ils connaissent mal le détail de notre fonctionnement et nous devons redoubler d’efforts de pédagogie. Nous devons aussi faire évoluer nos process, pour gagner en agilité. Nos designers ont bouleversé leur façon de travailler, ce que le travail à distance a accéléré.

Nous n’avons paradoxalement jamais été aussi proches de nos clients.

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